Les rythmes universitaires – Conférence introductive

Article publié le 18 mars 2020
Pour citer cet article : , « Les rythmes universitaires – Conférence introductive  », Rhuthmos, 18 mars 2020 [en ligne]. https://www.rhuthmos.eu/spip.php?article2531

Cet article présente une version rédigée du texte de la conférence introductive présentée par Élisabeth Letertre au Colloque Thélème – 29 novembre 2019 – université d’Angers.


Le premier colloque Thélème s’est déroulé le 29 novembre 2019. Thélème est un projet de l’université d’Angers et de l’université du Mans, dans le cadre de l’Appel à Projet (Nouveaux Cursus à l’Université) du troisième Programme d’investissements d’avenir (PIA3) [1].


Ce colloque avait pour thème, les rythmes à l’université, une notion particulièrement complexe que l’on va tenter, dans cet article, d’éclaircir, en mobilisant plusieurs disciplines de recherche. Cette question des rythmes peut être envisagée dans le contexte plus vaste de bouleversement des rythmes de vie et de travail, qui dépasse très largement les simples considérations d’organisation du temps, mais qui touche aussi au contenu des enseignements, à la manière d’enseigner, aux rôles et aux missions de tous les personnels au service des étudiants.

 Pourquoi ce thème ?

L’action ‘Nouveaux cursus à l’université’ (NCU), telle que définie dans l’appel à projet de l’Agence Nationale de la Recherche, en février 2017, orientait la réflexion sur le sujet du rythme des cursus. Il était demandé de réfléchir à des programmes de grande ampleur, tirant parti des possibilités offertes par le système LMD en matière de modularisation des enseignements et de gestion des rythmes et des modalités de certification. Le texte de l’appel à projet précise : l’action NCU se propose de développer « des démarches nouvelles, plus flexibles relatives à l’organisation des enseignements, aux contenus des formations, aux approches pédagogiques, aux rythmes d’acquisition, aux durées des parcours et aux modalités de validation des connaissances et des compétences. Les projets doivent permettre d’adapter l’offre universitaire à une individualisation des parcours et des rythmes de formation dans un contexte de mobilité professionnelle accrue ». Plus loin dans le texte, le recours au numérique est signalé afin d’optimiser le temps de formation pour les publics en formation initiale ou continue ayant des disponibilités limitées (salariés en reprise d’études, étudiants salariés, sportifs de haut niveau, etc.).


En octobre 2017, la concertation sur l’accueil et la réussite des étudiants voulue par Frédérique Vidal, a abouti à une série de propositions concrètes remises à la ministre par Daniel Filâtre [2], rapporteur général de la concertation, dont une alerte sur « les rythmes de formation ou plus exactement l’étalement des études, ou leur séquencement, qui sont peu pris en compte alors que les étudiants réclament plus de souplesse et d’accompagnement ».


Ce même automne 2017, le Think Tank Terra Nova produit un rapport [3] faisant le constat du nombre croissant d’étudiants en décalage avec les rythmes théoriques de l’université. « L’université ne tient pas compte du fait que, pour presque la moitié d’entre eux, ils travaillent en même temps qu’ils mènent leurs études. Elle les prive en outre de la possibilité de mûrir leur choix d’orientation, de varier leurs parcours, de bifurquer si leurs choix ne sont pas assez assurés. » Terra Nova propose « une réorganisation des temps universitaires. Il faut reprendre la question des rythmes universitaires à toutes les échelles de temps : la journée, la semaine, le semestre, le cycle et la vie entière (formation tout au long de la vie) ». Le rapport de Terra Nova alerte : l’université devra trouver sa place dans les dispositifs de formation tout au long de la vie. Il se veut aussi rassurant  : « Sans grande réforme législative chamboulant l’ensemble de notre système d’enseignement supérieur, il est possible d’introduire plus de souplesse dans l’organisation des cours et des examens, par la modularisation effective des unités d’enseignement et un système de validation des cycles d’étude repensé. »


C’est à la même période que les projets NCU de la vague 1 sont déposés [4]. Puis suivront en mars 2018, la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (ORE) mettant en avant les cursus de premier cycle rénové et en juillet 2018, l’arrêté Licence, dont l’article 8 qui détaille la charge de travail pour l’étudiant « comprise entre 4500 et 5400 heures sur l’ensemble du parcours de formation de licence correspondant au minimum à l’équivalent de 1500 heures d’enseignement et d’encadrement pédagogique. Ces références horaires et le déploiement des diverses activités de formation sont déclinés et adaptés notamment en fonction des modalités pédagogiques et des rythmes de formation mis en œuvre afin de tenir compte de la personnalisation des parcours, de la diversité des profils et des objectifs poursuivis par les étudiants ».


Frédérique Vidal, souhaite desserrer la contrainte et la forme temporelle propre à ce cursus. Dans son discours [5] au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, ce même mois de juillet, elle se dit convaincue que la personnalisation passe par « la prise en compte du rythme qui convient à chacun  : demander à tous les étudiants de réussir la même Licence au cours des trois mêmes années, c’est ne pas voir que certains ont besoin de plus. De plus de temps, bien sûr, mais aussi de plus d’accompagnement : c’est cela que nous allons désormais pouvoir leur offrir ; la nouvelle Licence permettra encore d’aménager plus largement les rythmes d’études pour prendre en compte les contraintes spécifiques de certains étudiants : activité professionnelle, situation de handicap, sport de haut niveau... ».


En février 2019, dans le prolongement de la publication de l’arrêté licence, Frédérique Vidal [6] a invité le Haut Conseil de l’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur à faire évoluer le référentiel d’évaluation de la qualité en licence pour intégrer les questions que se posent les établissements en termes de contrat pédagogique de réussite, de parcours personnalisés…


Avec le nouvel arrêté Licence et les NCU, l’indicateur de réussite ‘durée des études’ devient en effet bancal. « 39 % des étudiants scolarisés à temps plein qui entament une licence réussissent celle-ci sans en dépasser la durée théorique. Le taux de réussite trois ans plus tard augmente pour atteindre 67 % », indiquait l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques dans son rapport annuel ‘Regard sur l’éducation’ rendu public le 10 septembre 2019. La logique universitaire actuelle est que l’on obtienne son diplôme marche après marche, c’est-à-dire semestre après semestre : les chiffres de réussite des étudiants dans les universités françaises, dans les rapports du ministère de l’Enseignement supérieur, sont des pourcentages d’étudiants entrés en première année de licence et ayant obtenu leur licence trois ans plus tard, ou avec une année supplémentaire. Mais ce calcul ne tient plus, et l’HCERES prend note que la nouvelle licence ne sera plus structurée par années, mais selon des parcours individualisés avec l’objectif d’augmenter la réussite des étudiants. « Ces parcours à la carte et cette nouvelle temporalité vont rendre la mesure de la réussite plus complexe qu’avant, où il suffisait de regarder le pourcentage d’étudiants qui passaient de L1 en L2, puis de L2 en L3, et finalement obtenaient leur licence. » [7] Le 18 septembre, Philippe Lalle, conseiller stratégique pour la pédagogie au MESRI annonce qu’un nouvel indicateur « va sortir prochainement » [8]. Il s’agira « de suivre le nombre de crédits ECTS qu’une cohorte d’étudiants obtient au bout de 6 mois, puis un an ». La réussite étudiante se mesurera sur le cumul de crédits ECTS.


Parcours personnalisé, diversité de cheminements individuels, rythmes adaptables, contrat de réussite, la loi ORE souhaite opérer un changement de paradigme qui place en son centre l’étudiant. La licence est donc un diplôme en ‘refondation’. Ce chantier de grande ampleur accorde beaucoup d’importance au rythme personnel de chaque étudiant. 

 Quel temps fait-il à l’université ?

Pour rappel, depuis le processus de Bologne, puis le décret LMD du 8 avril 2002, les formations sont organisées en semestres. En 2010, dans le cadre des premiers effets du plan ‘Réussir en licence’ lancé en 2009, la durée de l’année universitaire a été allongée sur 10 mois, entraînant une nouvelle conception des rythmes universitaires plus respectueux du bien-être étudiant, facteur de réussite. Les établissements ont été invités à adopter une charte sur les rythmes quotidiens et hebdomadaires des étudiants (pause du midi, échelonnement des sorties de cours, limitation à 4 h de la durée d’un enseignement sans pause, meilleure répartition des cours sur la semaine de façon à limiter la durée quotidienne d’enseignement, aménagement du temps des étudiants empêchés) [9].


Mais, nous n’avons pas réellement assisté à un changement de l’unité de référence qui reste l’année, avec une organisation en deux périodes de durées variables. Le cycle ‘inscriptions, enseignements, examens, vacances’ est immuable. Les étudiants sont obligés de suivre un parcours à durée définie pour acquérir le diplôme (ils ne peuvent aller plus vite). Saeed Paivandi, chercheur en sciences de l’éducation décrit : « les programmes universitaires sont conçus en fonction de ce temps quantitatif en privilégiant une seule figure d’étudiant, motivée, compétente, bien orientée et à temps plein. Un étudiant idéal est celui qui fait son M1, M2, L3 en une année. [10] »


Déjà dans les années 1980, Aniko Husti, missionnée au conseil national des programmes, écrivait que « l’utilisation du temps était l’une des dimensions les plus périmées de l’institution éducative ». [11]


Mais, le temps change …


Désormais, les césures sont possibles dans le cursus, l’arrêté licence permet l’éclatement de la L1 en deux années : les ‘oui si’ constituent un exemple de changement du premier cycle universitaire. Est-ce que le devenir de ces dispositifs se pose maintenant dans le contexte d’une évolution de l’offre de formation des licences vers une véritable flexibilisation des cursus libérés de la référence annuelle ?

 Rythmes, de quoi parle-t-on ?

Selon le psychologue François Testu [12], l’expression « rythmes scolaires » renvoie soit aux variations périodiques biologiques, physiques et psychologiques propres à l’enfant en situation scolaire, soit aux emplois du temps et calendriers. Il s’agit ici d’une rythmicité environnementale, fixée, qui joue le rôle de synchroniseur des rythmes biologiques et psychologiques. Les recherches en chronosciences permettent de déterminer quelles seraient les périodes de la journée où les enfants sont le plus réceptifs à tel type de savoir et quelle serait la meilleure manière d’aménager notamment la journée scolaire pour respecter leur propre rythme. Claire Leconte, enseignante-chercheur en psychologie de l’éducation à l’université de Lille, refuse d’utiliser cette expression : « rien dans le scolaire n’est rythmé, au sens d’événements qui se reproduiraient à l’identique en fonction d’une certaine périodicité ». [13] Elle reproche à l’expression son caractère réducteur qui peut conduire à donner à ces « aménagements » un pouvoir miraculeux. Il ne suffit pas de modifier des emplois du temps pour que subitement la réussite scolaire s’améliore ! Claire Leconte parle plutôt de l’organisation des temps de vie, qui oblige à se préoccuper de tous les temps et à s’intéresser aux contenus de ces temps. Le terme ‘polyrythmie’ utilisé par le psychologue Francis Lesourd [14], permet d’englober ces temps multiples : le temps académique, le temps studieux, le temps personnel, social et familial, et pour quelques étudiants, le temps professionnel.


Avant de parler des rythmes, il semble opportun de s’attarder sur ces temps, d’observer comment les temporalités s’enchevêtrent, dans un contexte numérique, connecté et désynchronisé.

 Que fait l’étudiant de ses temps ?

L’organisation temporelle académique permet une première description du rapport au temps des étudiants. Le cadre temporel de l’université est résumé dans l’emploi du temps (EDT) que chacun attend à chaque rentrée. L’EDT est bien l’outil le plus utilisé dans l’Environnement Numérique de Travail Etudiant (ENT) : il signale la présence attendue en cours. C’est un sujet récurrent dans les verbatim des étudiants, issus des enquêtes formation. L’emploi du temps est souvent jugé « mal réparti, parfois trop chargé, parfois troué, avec des temps morts, ‘4h dans une journée de 8h à 19h’, des creux en milieu de semestres », semestres qui sont parfois « déséquilibrés », une année « courte »… et les sessions d’examen qui donnent la cadence.


André Giordan, chercheur en sciences de l’éducation, dénonce le « sempiternel cadre organisateur de l’école : une discipline – un cours – une heure – un enseignant ». [15] Pour Aniko Husti, l’emploi du temps est devenu « un stéréotype » : « l’emploi du temps, comme point de convergence d’une conception de l’enseignement est le dernier bastion à prendre ; ou le premier, pour commencer un processus de transformation en chaîne. » [16]


En 2001, dans leur rapport au Ministre de l’Éducation nationale, Dominique Borne et François Perret, de l’Inspection Générale de l’Education Nationale, les rejoignent : « A la différence de la question des rythmes scolaires, celle de l’organisation du temps de l’enseignement ne paraît pas avoir retenu l’attention des historiens de l’éducation. Tout se passe comme si le temps scolaire, organisé autour d’unités fixes (l’heure de cours) et de la répétition hebdomadaire d’un même schéma, apparaissait comme une donnée immuable, quasi naturelle, qu’il convient d’accepter comme telle et qui ne serait pas justiciable d’une réflexion particulière. » [17]


Ainsi, il faut, dans ce cadre composé de strates temporelles, soupeser l’épaisseur des tranches horaires, interroger la durée des cours, le volume horaire hebdomadaire, le découpage de l’année en semestre, l’empilement d’années en cycles, l’étalement de ce temps prescrit.


Lié aux disponibilités des enseignants et des locaux, le temps génère un ensemble de contraintes. La rythmique de « l’heure de cours » est le principe organisateur de la vie pédagogique et l’unité de base pour la définition des obligations des enseignants. D’où le casse-tête des concepteurs d’emplois du temps.


A partir de cet emploi du temps collectif qui crée un présent commun et quadrille les choses à faire à l’université, chaque étudiant va peu à peu structurer les rythmes qui composent sa vie : le temps de présence en cours, le temps hebdomadaire consacré à l’étude fractionné ou au contraire concentré en plages de longue durée qui vont venir façonner et conditionner le temps libre. Qui pour certains sera de loisir et pour d’autres, salarié.


Pour le sociologue Bernard Lahire, les deux variables « temps de travail personnel » et « assiduité » constituent une « socialisation silencieuse » [18] qui marque les différences de réussite dans le parcours universitaire. Le sociologue Alain Coulon résume : être étudiant, « c’est acquérir cette compétence qui permet de reconnaître quel type et quelle quantité de travail intellectuel il faut fournir et dans quel délai », c’est passer par le « temps de l’étrangeté » sans repères et le « temps de l’apprentissage des règles, codes et rythmes » [19] : l’affiliation universitaire est conditionnée à l’affiliation à la temporalité de l’université. « Entrer à l’université » souligne encore l’auteur, « c’est explorer et vouloir volontairement se plonger dans les codes qui en définissent l’organisation. Ces codes sont souvent opaques, voire illisibles ».


Pour Saeed Paivandi, « l’existence d’un certain impensé vis-à-vis de la temporalité étudiante est un mal français » [20]. Les temporalités universitaires sont diffusées de manière implicite. « Le moment de l’université n’est pas préparé, compris et vécu de la même manière par les différents groupes d’étudiants » : pour certains il fait sens, pour d’autres, il est semé d’embûches. D’ailleurs, ces étudiants de licence sont plutôt demandeurs d’une routine temporelle qui constitue une forme de cadrage, une référence temporelle stable et qui leur offre un sentiment de cohérence et de prévisibilité.


Des recherches comparent la structuration temporelle des formations et leur effet socialisateur plus ou moins intense : la sociologue Muriel Darmon montre par exemple comment les classes préparatoires [21] façonnent des étudiants par un apprentissage de la gestion de temporalités multiples dans une logique de l’urgence (qui pour certains deviendra une addiction temporelle à l’urgence).


Le rapport au temps est déterminé par la structure sociale (la famille, l’école…). Il s’exprime sous la forme de pratiques, d’habiletés, de représentations, de perceptions et de sensations. Car si le temps est défini collectivement, au travers de rythmes, sa perception varie en fonction des expériences personnelles vécues.


Ainsi, quelques étudiants, pour parler de leurs débuts à l’université, invoquent le souvenir du passage du primaire au collège qui les a obligés à se plier à un changement important de rythme. Ils insistent alors sur la liberté considérable dont ils jouissent comparé au lycée : comment occuper et organiser son temps journalier et hebdomadaire ? Car l’apparente liberté est un piège, « on est dans un faux rythme », il faut résister à la désorganisation, ils craignent alors la dispersion des cours, redoutent les intercours, temps d’attente inutiles. Pourquoi se lever à 7 heures du matin, si les cours ne débutent pas avant 14 heures ? Le temps universitaire est « un temps élastique » [22], selon l’expression du sociologue Stéphane Beaud, où l’étudiant en recherche d’ancrage, parfois isolé, doit construire lui-même son cadre temporel, trouver son rythme, alors que les modes de contrôle et de suivi se relâchent. Les étudiants s’inventent alors des pratiques de travail caractérisées par leur irrégularité, surtout lors des révisions. Et quand une temporalité empiète sur les autres, cela génère tension, angoisse, et culpabilité.


La maîtrise du temps libre est bien l’une des premières sources de difficultés. Les étudiants expriment leur perception de ce temps déstructuré qu’il trouve selon les activités trop court ou bien long et ennuyeux avec le sentiment de le perdre quand ils ne courent pas après, juste avant les examens. Le temps est utile ou inutile, passant lentement ou vite. Pour Jean-Michel Génevaux et Samuel Gougeon, enseignants-chercheurs en physique, à l’université du Mans, il est illusoire de penser que le travail personnel consenti hors séances de cours permet de gommer les différences de rythmes en cours [23].


Selon l’économiste Louis Lévy-Garboua [24], ce temps librement consacré à l’étude fluctue car il est à mettre en relation avec la perception qu’ont les étudiants de leurs perspectives de gain, notamment professionnelles, face à la valeur relative du diplôme sur le marché de l’emploi. Alain Coulon le rejoint : certains étudiants « calculent leur cursus en fonction de leurs stratégies d’orientation dans le temps » [25]. Pour Jean Perrot [26], un autre économiste : l’étudiant affecte son temps aux matières qui lui rapportent le plus de bénéfices scolaires et délaisse les matières pour lesquelles sa rentabilité est faible.


Mais pour Saeed Paivandi, qui dénonce la vitesse comme valeur absolue, le temps perdu n’est pas un temps gaspillé : la lenteur peut être une solution pour les personnes qui ne trouvent pas leur chemin ou n’arrivent pas à élaborer leur projet de vie [27].


L’observation des usages du temps libre par les étudiants révèle cette expérience d’un temps indéterminé et mouvant. Des travaux [28] avancent que « les étudiants qui ont un emploi du temps serré et institutionnellement scandé sont aussi ceux qui sont le plus engagés dans le sport, la culture ou l’activité associative et qui réussissent le plus et le mieux (…) les étudiants apprennent à maîtriser leur temps et à le structurer. »


Les travaux sur les conditions de vie des étudiants, notamment le rapport d’activité 2015-2017 de l’Observatoire National de la Vie Etudiante qui contient un chapitre sur les rythmes d’études, nous éclairent sur les rapports au temps qui naissent de la combinaison de ces expériences temporelles subies ou choisies par les étudiants. Quels arbitrages font les étudiants entre les divers usages du temps ? [29] Comment et pourquoi décident-ils d’accorder plus de temps à telle ou telle activité ? Comment s’adaptent-ils aux contraintes temporelles ? Comment gèrent-ils le temps dans ce monde désynchronisé, au « présent hypertrophié » [30] comme le qualifie le psychosociologue Jean-Pierre Boutinet ?


Ces enquêtes s’accordent en effet à montrer l’hétérogénéité d’une population étudiante aux conditions d’études et aux conduites temporelles très diversifiées. « Les différenciations internes selon les filières représentent par ailleurs une clé de lecture indispensable à la compréhension des nouvelles formes d’inégalités dans le supérieur » [31]. En 2017, Richard Gaillard, enseignant-chercheur en sociologie et Franck Rexand-Galais, enseignant-chercheur en psychologie, publient une observation d’envergure portant sur les conditions de vie de la population étudiante de l’université d’Angers, réalisée au moyen d’enquêtes quantitatives entre 2008 et 2015 [32], complétée par les études de Jérôme Prugneau et de Christian Pihet (tous les deux enseignants-chercheurs en géographie) et de Muriel Travers et de Christophe Daniel (enseignants-chercheurs en économie)  : les questions de temporalité et d’espaces vécus par la population étudiante sont envisagées à la lumière des enjeux que constituent les déplacements, le choix d’un mode de transport, les espaces de vie, le logement ou les budgets-temps attribués aux différentes activités. Les données recueillies qui permettent d’analyser comment les étudiants négocient au quotidien des temporalités qui peuvent être vécues comme conflictuelles, sont d’une grande richesse. Richard Gaillard souligne par ailleurs comment le temps et la liberté de son usage peuvent constituer des objets de propriété sociale [33].


Il est par exemple difficile de parler de temps à l’université sans évoquer la situation des étudiants salariés, de leurs parfois doubles journées ou celles des étudiants sensibles au risque de précarité.


Ces chercheurs considèrent que l’ensemble complexe de ces temporalités peut influencer fortement les parcours d’études. Leurs recherches nous permettent de prendre conscience que les étudiants changent et que la réussite s’envisage autrement. Dans le même sens, les travaux de Bénédicte Froment au sein de l’université de Tours interrogent : « est-ce que l’implication temporelle des étudiants dans l’activité universitaire observée dans l’articulation entre les emplois du temps de la formation, les temps personnels de travail studieux et les contraintes liées aux modes de vie étudiants jouent un rôle significatif dans la réussite ? » [34]


Les neurosciences cognitives apportent également un complément de connaissances : Grégoire Borst, professeur de psychologie du développement et de neurosciences cognitives, dans sa conférence de juillet 2019 [35] « Evaluer les métacompétences, un enjeu pour la réussite des étudiants au XXIe siècle », rappelait volontiers quelques données de base concernant la maturation du cerveau « qui se développe jusqu’à l’âge de 25-27 ans. Les dernières parties du cerveau à se développer sont situées dans le cortex préfrontal. Celles-ci nous permettent de contrôler nos émotions, mais aussi de raisonner, de planifier et de contrôler nos comportements ». L’étudiant qui arrive à l’université, est donc en pleine maturation, dans cette période de transition entre deux âges. La capacité d’autocontrainte au travail personnel est en cours d’acquisition. Le médecin Marie-Pia d’Ortho complète : le conflit avec les rythmes biologiques est exacerbé quand le sommeil manque ; dans cette tranche d’âge, « période cruciale pour les capacités de synthèse, d’analyse et de mémoire, alors que la plasticité cérébrale joue à plein régime, le sommeil, dans toutes ses dimensions, est primordial » [36]. Or, près de 4 jeunes sur 10 (38 %) ferment l’œil moins de sept heures par nuit en semaine, selon l’enquête de l’Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV) et de la MGEN de mars 2018.

 Quelle dynamique pour ces temporalités ?

Reconnaître la présence de ces temporalités multiples, collectives et individuelles, leurs rapports de force, permet de rendre explicites les systèmes de valeurs qui légitiment tel rapport au temps. Ainsi l’étudiant en échec éprouve de grandes difficultés à « prendre rendez-vous, à différer des actions » [37], à occuper les temps morts. En 2007, Le Monde de l’éducation titrait un dossier : « Travailler moins pour apprendre mieux : peut-on faire réussir les élèves avec moins de temps ? » (Le Monde de l’éducation, 2007). Le temps serait-il donc une variable-clé de l’amélioration du système d’enseignement ? Christophe Boujon, enseignant-chercheur en psychologie à l’université d’Angers, interroge : les rythmes scolaires doivent-ils être seulement conçus avec l’idée qu’il existe un rythme d’apprentissage idéal et universel ou en tenant compte des différences d’acquisition ? Autrement dit, le but d’un apprentissage en est-il la maitrise (que l’enfant maitrise mieux ses compétences) ou la performance ? (qu’il soit plus performant que les autres) ? « Il faut évidemment privilégier dans les apprentissages le but de maitrise pour éviter la diminution ou l’absence de motivation et donc d’attention. Tous les enfants – même d’un âge identique – évoluent différemment, physiologiquement et intellectuellement. » [38]


Mais comment savoir si les étudiants sont réellement en activité ? Selon le rythme du cours, l’attention de l’étudiant fluctue. Le mot ‘attention’ a une résonance très forte dans la thématique que nous sommes en train d’explorer : être attentif, c’est accorder du temps, c’est synchroniser temps intérieur et temps prescrit. Ce n’est donc pas la quantité du temps passé [39] qui influence réellement la performance des étudiants mais bien la manière d’utiliser ce temps. Or il est méthodologiquement difficile de mesurer l’usage du temps de l’apprentissage, quand l’étudiant « repasse » son cours selon l’expression du philosophe Gaston Bachelard [40]. L’emploi du temps sur l’ENT ne nous renseigne que partiellement sur le temps réellement employé, l’expérience intime du temps, « les instants d’attention » pour citer Bachelard [41]. En 1975, Michel Verret, avait tenté dans sa thèse, de mesurer le temps d’attention réel des étudiants durant un cours, en essayant d’interpréter leurs attitudes, comme celle qui consiste à regarder par la fenêtre [42]. Quelques étudiants n’ont pas de gêne à dire ce qu’ils font réellement pendant les cours : des activités sans lien avec le cours lui-même, notamment sur smartphone qui leur permettent d’investir ce temps par exemple pour garder le rythme de la vie sociale. « Ce n’est pas en temps de scolarité qu’il faut investir mais en attention, en intelligence, en inventivité, en qualité » [43] écrit le sociologue Philippe Perrenoud.


Alors que Richard Gaillard pose un regard sur les changements de rythmes et de temporalités impliqués par la vie universitaire et sur les inégalités de capacité d’adaptation des étudiants face à ces changements, à l’IREDU, laboratoire d’économie et de sociologie de l’éducation de l’université de Bourgogne, des travaux développent la notion de pratique d’étude en explorant l’effet « enseignant ». [44]


Le premier souci des enseignants est de trouver de quoi occuper le temps scolaire avec des choses à faire, caricature le psychologue Robert Burns [45].


La mise en temps du cours est pourtant une tâche difficile. Comment se structure le temps dans l’organisation du cours, quand l’enseignant accélère, ralentit, patiente, essaie de faire avancer à la même vitesse, partage le temps, en perd ou en gagne, ose prendre le temps, … ? Comment utiliser efficacement le temps à disposition tout en essayant de respecter le rythme de chacun ?


Comment les enseignants, soumis eux-mêmes à des contraintes temporelles fortes, utilisent la portion de temps qui leur est allouée ? Pour Marie-Pierre Chopin, chercheuse en sciences de l’Éducation, le temps didactique n’avance pas comme celui de l’horloge, il « possède sa respiration propre ». [46] Aussi propose-t-elle de « différer la question ‘combien faut-il de temps ?’, pour s’atteler à la nature même de la temporalité en jeu dans les débats sur l’école : ‘comment se fait le temps de l’enseignement ?’. » [47] Son approche rejoint celle du pédagogue, Bruno Suchaut, pour qui « le temps doit être considéré comme la ressource centrale pour les apprentissages des élèves, sachant que sa dimension qualitative est plus importante que sa dimension quantitative : c’est bien l’usage que l’élève peut faire du temps et non seulement son volume qui détermine l’efficacité pédagogique  » [48].


Philippe Perrenoud est radical : cessons donc de considérer le temps comme la seule ressource disponible pour faire face aux inégalités. Raisonnons sur la qualité et l’intensité de la prise en charge pédagogique. Aniko Husti, a proposé le concept de « temps mobile » [49] en poursuivant l’idée de faire du temps de travail de l’élève un outil au service des apprentissages. Elle s’insurge, avec le pédagogue André de Peretti [50] contre l’émiettement des contenus créant des phénomènes de hâte et d’anxiété. Tous deux veulent restaurer les « durées longues » qui rendent possibles « des articulations de concepts et des enchaînements, et assurent aussi des gains de temps en économisant les délais de mise en place du cours » [51]. Paul Fraisse, qui a développé la notion de « chronopsychologie » [52], a décrit les effets négatifs du morcellement de l’activité sur la perception du temps. Plus c’est morcelé, plus ça paraît long. Claire Leconte commente : « Le meilleur moyen d’enrichir les tâches consiste à recréer des unités d’activités plus complexes et plus durables afin de diminuer le nombre d’actes à produire pendant le temps de travail. Il est important d’y penser quand on veut améliorer la qualité de travail des enfants mais aussi de celles et ceux qui ont en charge leur éducation. » [53]


Alors que les NCU et la loi ORE interrogent la durée des études, un regard critique sur ce vaste puzzle figé qu’est l’emploi du temps paraît s’imposer. Morcellement horaire, cloisonnement rigide des disciplines, isolement des enseignants : le découpage du travail en heures de cours fait oublier que ce découpage du temps oblige un découpage du contenu. Or, énonce Aniko Husti, quand on découpe du contenu, on découpe du sens. Sa démarche vise à définir un modèle d’organisation du temps qui donnerait un sens pédagogique au temps perçu non plus comme une contrainte mais comme un outil pédagogique. Ses travaux, qui datent des années 1980, rejoignent ceux qui s’intéressent aux structures temporelles constitutives des disciplines [54]. Et donc singulières. [55]


Mais l’existence de nombreuses contraintes immobilières, calendaires et administratives ne facilite pas la tâche de l’enseignant qui fait cours à des étudiants aux rythmes singuliers. L’organisation du temps est déterminée par un principe administratif de gestion des enseignants et leurs obligations de service. En 1976, à l’époque des commissions sur le surmenage, le Dr Guy Vermeil [56], se préoccupe de la fatigue des enseignants et leur propose de travailler moins chaque jour et plus de jours dans l’année. Depuis, les pionniers de la « slow education » ont pris le relais : « En éducation, moins c’est plus », « L’éducation nécessite du temps sans temps » [57]… La sociologue, Christine Musselin [58], dans son livre Les universitaires, énonce les activités très diverses et peu quantifiables des enseignants : négociation de stages, contact avec les futurs employeurs d’étudiants, activité de conception et de gestion de cours en ligne, préparation de conférence, négociation de contrats de recherche, correction de copies … Marie-Françoise Fave-Bonnet, chercheuse en sciences de l’éducation, qualifie ce temps comme « à la fois non contraint et surchargé » [59]. Les rythmes quotidiens enchevêtrés, saccadés, dispersés, parasités par les mails sont dénoncés comme un mal chronique. A cela, il faut ajouter des difficultés à consacrer le temps nécessaire pour se former sur ces outils qui ne cessent de changer et le rythme effréné des réformes tel que souligné par Jean-Philippe Melchior, enseignant-chercheur en sociologie à l’université du Mans : « cette accélération présentée comme synonyme d’efficacité et apparentée au volontarisme, déstabilise le rapport à l’avenir et participe au brouillage des repères. Elle favorise l’installation d’un climat d’incertitude, facteur d’inquiétude, de résignation, voire de sidération. » [60] Les résultats de la quatrième édition du baromètre EducPros, publié en avril 2017 [61] confirment cet état d’esprit : enseignants-chercheurs et BIATSS [62] sont continuellement tiraillés entre l’envie de bien faire leur travail et l’impression de manquer de temps et de moyens.

 Quand le temps est apprentissage…

Le temps universitaire compose donc avec un faisceau de contraintes, auxquelles les différents rythmes viennent répondre. Pour les étudiants comme pour les enseignants, faire l’expérience du ’manque de temps’ [63] ou de la difficulté à ’prioriser’ conduit à la nécessité de revisiter de façon critique le rapport aux temps. La manière d’agir crée le rythme qui est, à première vue, affaire d’organisation, de régularité, d’alternance, de cadence. La rythmanalyse qui a pour enjeu de comprendre la polyrythmie, souligne le caractère plutôt irrégulier et inattendu du rythme, fait notamment d’intervalles, de silences, de blancs, tel que décrit par le sociologue Henri Lefebvre [64].


Le rythme permet, entre autres, d’intégrer la notion de repos, exprimé par Bachelard, formulé par l’économiste Philippe Askenazy dans l’expression « reposer le travail » [65] et résumé par la psychologue Lila Davachi : « le repos est propice à la mémoire ». [66]


Pour chacun d’entre nous, garder le rythme, être dans le rythme nécessite une accommodation parfois difficile. Rechercher un usage optimal du temps, distinguer les temporalités à l’œuvre dans le métier d’enseignant ou d’étudiant dépasse les aspects organisationnels et implique de façon plus large le rapport à soi et à son milieu. Francis Lesourd utilise la notion d’« enveloppe temporelle » pour décrire la complexité du rapport au temps [67]. L’expression « équation temporelle personnelle » [68] de William Grossin l’un des pionniers de l’étude sociologique des temps, invite à développer un rapport au temps le plus cohérent, coordonné et équilibré possible. C’est peut-être même un enjeu de formation, pour apprendre à ‘rythmer les rythmes’. Le chercheur en Sciences de l’Education, Gaston Pineau l’appelle chronoformation [69].


L’objectif de ce colloque est d’interroger l’importance de la mise en perspective des mots clés proposés par le ministère (parcours personnalisé, flexibilité, modularisation, rythmes adaptables, orientation et réussite….) pour que la promesse d’autonomie puisse être réfléchie dans ses dimensions temporelles et pédagogiques.


Si l’on s’appuie, avec l’arrêté licence, sur le contrat pédagogique pour mesurer la réussite étudiante et, au regard des études pluridisciplinaires que l’on vient de passer en revue, ce contrat devra dépasser une approche uniquement gestionnaire du temps, pour adopter une approche pédagogique du temps. Organiser des cursus à plusieurs vitesses, découper le temps en périodes et en moduler les niveaux d’exigence dans des parcours ne suffira, semble-t-il, pas. Si les choix d’orientation sont « des formes plus ou moins évoluées de maîtrise du temps » [70], ce contrat, ne pourra alors pas faire l’impasse sur ces temporalités qui émanent des enseignants et des étudiants eux-mêmes, sur leurs perceptions, leur ressenti de la durée, selon leurs manières d’étudier et leur investissement studieux. Privilégier telle forme de rythme dans le contexte de ce contrat permettrait de légitimer ce rythme comme juste et cohérent pour le projet poursuivi. Pour que ce contrat enfin, soit une étape clé, un instrument pour se figurer l’horizon temporel, l’étudiant devra être en mesure de reconnaître les rapports de force entre ces temporalités, de choisir des rythmes, de prendre du recul, de faire le point régulièrement, de développer une conscience temporelle. L’université reconnaîtra en retour les différences pour permettre d’autres réussites.


Alors que chacun est en prise avec le temps, alors que les principaux repères temporels se diluent, les NCU, Projet d’Investissement d’Avenir, font le pari de la flexibilité temporelle. Réviser le temps, c’est rechercher d’une part une amélioration des conditions de vie et de travail des étudiants, des enseignants et de tous les services techniques et administratifs qui les accompagnent et, d’autre part, viser un desserrement des contraintes.


C’est pourquoi il est indispensable de porter attention aux temps, temps studieux et autres temps de vie, et à leurs rythmes entrelacés, dans une vision plus large du temps de formation, tout au long de la vie.


Plutôt qu’une ressource rare, qui se consommerait, le temps est une matière première. Précieuse. Et l’orchestration cohérente, raisonnable de toutes ces temporalités est une quête de sens.


Cette introduction est le fruit d’un travail documentaire illustrant la diversité de la problématique et des domaines reliés. Il ne prétend pas à l’exhaustivité : n’ont pas été observés les mutations des temporalités sociales impliquées par le numérique, l’emploi étudiant ou encore l’impact de la professionnalisation sur la répartition du temps d’études. La table ronde organisée dans ce colloque permettra non seulement d’explorer ces dimensions mais aussi d’évoquer des leviers pour ouvrir d’autres perspectives pour les formations. Profitons de cette réflexion, de ce temps du possible, qui nous est proposée pour mieux approcher cette question d’une grande complexité, dont les implications sont multiples et qui porte de fortes attentes sur le rôle et les exigences du système universitaire d’aujourd’hui.


Pour conclure, voici un clin d’œil à François Rabelais, à qui THELEME a déjà emprunté l’abbaye et un peu de son idéal humaniste : « Jamais, s’écria Frère Jean, je ne m’assujettis à heures. Les heures sont faites pour l’homme et non l’homme pour les heures. » [71]

Notes

[1L’action « Nouveaux cursus à l’université » a pour objectif de soutenir les universités, les écoles et les regroupements d’établissements qui souhaitent diversifier leur offre de formation afin de répondre aux enjeux auxquels est confronté le système français d’enseignement supérieur. https://anr.fr/fr/detail/call/nouveaux-cursus-a-luniversite-ncu-vague-1-2017/

[2Daniel FILÂTRE, Réformer le premier cycle de l’enseignement supérieur et améliorer la réussite des étudiants, Rapport général, 19 octobre 2017

[3Terra Nova, Etudes supérieures, rythmes choisis, rythmes subis, Rapport par Martin ANDLER, Laurent DAUDET, Gilles HALBOUT, Jean-Pierre KOROLITSKI, Yves LICHTENBERGER, Catherine PARADEISE, 14 octobre 2017.

[4{{}} Le 13 octobre 2017, a été communiquée la liste des 17 lauréats de la première vague de l’appel à projets Nouveaux cursus à l’université du P.I.A. 3, doté d’une enveloppe de 250 millions d’euros sur 10 ans, et dont la gestion a été confiée à l’Agence Nationale de la Recherche. 66 projets avaient été déposés.

[5Présentation du nouvel arrêté Licence au CNESER, 9 juillet 2018.

[6Courrier de Frédérique VIDAL à Michel COSNARD, Président de l’HCERES, 25 février 2019.

[7Michel COSNARD, Dépêche AEF, 19 juillet 2019.

[8Philippe LALLE, Dépêche AEF, 18 septembre 2019.

[9Par exemple : charte des rythmes adoptée à l’université François-Rabelais en juillet 2013.

[10Rencontre avec Saeed PAIVANDI, Comprendre l’étudiant et sa temporalité pour améliorer la pédagogie à l’université, SU2IP – Université de Lorraine, 27 octobre 2016.

[11Aniko HUSTI, La dynamique du temps scolaire, Hachette Education 1999 : « Une des dimensions les plus périmées de l’enseignement secondaire est certainement son utilisation du temps, puisque l’institution éducative a adopté et imposé tout au long de notre siècle le même concept de temps, tout en fixant continuellement des objectifs nouveaux. »

[12François TESTU, Rythmes de vie et rythmes scolaires, Aspects chronobiologiques et chronopsychologiques, Paris, Masson, 2008

[13Claire Leconte, Des rythmes de vie aux rythmes scolaires : Une histoire sans fin, Presses universitaires du Septentrion, Collection Savoirs mieux, Avril 2014

[14Francis LESOURD, Construire et habiter le temps de l’enseignement en ligne, dans Kim S. et Verrier C. (dir.), Le plaisir d’apprendre en ligne à l’université : implication et pédagogie, Bruxelles, De Boeck université, 2009

[15André GIORDAN, Apprendre ! Belin, 1998. « A terme, il s’agit […] de sortir du sempiternel cadre organisateur de l’école : « une discipline – un cours – une heure – un enseignant ». […] Ce saupoudrage horaire donne peu de temps pour s’investir dans une tâche ou un projet. La pratique de l’heure de cours conduit l’élève à « zapper ». Il ne peut être créatif. Il doit commencer et recommencer sans cesse des apprentissages et les interrompre aussitôt, six à sept fois dans la même journée. Les temps de réflexion individuelle, le travail en groupe ou le contact personnalisé avec l’enseignant sont réduits à la portion congrue. Ce saucissonnage conduit l’élève à se disperser. Sa motivation et son attention se diluent. L’enseignant doit reprendre tout à zéro ou presque chaque fois. Comment peut-il remotiver sans cesse ? »

[16Aniko HUSTI, La dynamique du temps scolaire, Hachette Education 1999. Aniko Husti dénonce « un immense retard de la pensée sur le sens du temps dans l’enseignement. »

[17Dominique BORNE, François PERRET, IGEN, L’emploi du temps des élèves au lycée, Rapport à Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale, 2001

[18Bernard LAHIRE, Les manières d’étudier, Cahier de l’Observatoire de la vie étudiante, La Documentation française, 1997

[19Alain COULON, Le métier d’étudiant, Paris : Economica-Anthropos, 2005

[20Rencontre avec Saeed PAIVANDI, Comprendre l’étudiant et sa temporalité pour améliorer la pédagogie à l’université, SU2IP – Université de Lorraine, 27 octobre 2016.

[21Muriel DARMON, Classes préparatoires, la fabrique d’une jeunesse dominante, La Découverte, 2015

[22Stéphane BEAUD, « Le temps élastique. Étudiants de « cité » et examens universitaires », Terrain. Carnets du patrimoine ethnologique, 29, septembre 1997.

[23Jean-Michel GENEVAUX, Samuel GOUGEON, Adrien PELAT, Jean-Pierre DALMONT, Nicolas JOLY, Leur remonter les bretelles avant l’examen ou leur faire passer des ceintures ?... De quoi donner des boutons !, Congrès Francais de Mécanique 201, Bordeaux, France, 2013,

[24Louis LEVY-GARBOUA, Les demandes de l’étudiant ou les contradictions de l’université de masse. Réponse aux commentaires, Revue française de sociologie,1978

[25Alain COULON, Le métier d’étudiant, Paris : Economica-Anthropos, 2005

[26Jean PERROT, Les influences des caractéristiques de l’offre d’éducation sur l’organisation du temps des élèves, Revue française de pédagogie, N°69, 1984. « La production de valeur scolaire s’effectue en utilisant des ressources temporelles. »

[27Saeed PAIVANDI : « le moment de l’université implique une vraie quête de sens dans la perspective d’un projet à long terme. » in Performance universitaire, apprentissage et temporalité des étudiants, Revue française de pédagogie, n°202, 2018

[28Mariangela ROSELLI, Nathalie CHAUVAC, Saïd JMEL, Le temps libre des étudiants (chapitre 6), in Les vies étudiantes, Tendances et inégalités, sous la dir.de Jean-François GIRET, Cécile VAN DE VELDE, Elise VERLEY, La documentation française, 2016

[29Sur les déterminants de ce processus d’allocation temporelle, Alain FERNEX, Laurent LIMA, Erica De VRIES Exploring time allocation for academic activities by university students in France. Higher Education, 69, 2015, cité dans Les vies étudiantes, Tendances et inégalités, sous la dir.de Jean-François GIRET, Cécile VAN DE VELDE, Elise VERLEY, La documentation française, 2016

[30Jean-Pierre BOUTINET, Penser l’accompagnement adulte, Presses Universitaires de France, 2007.

[31Séraphin ALAVA, Marc ROMAINVILLE, Les pratiques d’étude, entre socialisation et cognition, Revue française de pédagogie, n°136, 2001 ; Bernard LAHIRE, Les manières d’étudier, Paris : La Documentation française, 1997 ; Jean-Pierre TERRAIL, Familles ouvrières, école, destin social (1880-1980), Revue française de sociologie, vol.25, n°3, 1984 : les disparités d’accès aux filières suggèrent certaines disparités de « maîtrise gestionnaire du temps ».

[32Richard GAILLARD, Franck REXAND-GALAIS (dir.), Christophe DANIEL, Christian PIHET Jérôme PRUGNEAU, Muriel TRAVERS, La condition étudiante à l’épreuve du territoire, Presses universitaires de Rennes, 2017

[33Richard GAILLARD, Enjeux des changements de temporalité dans la mise en œuvre des politiques sociales, RES, vie sociale, 2013

[34Philippe CORDAZZO, Christine GUEGNARD, Séverine LANDRIER, Etudes, galères et réussites, Conditions de vie et parcours à l’université, La documentation française, 2017. Fruit de deux années de travaux en groupe, cet ouvrage se décline en six chapitres présentant les études, les réussites et les galères des étudiants selon leurs propres visions ou perceptions. Le chapitre 4 rédigé par Bénédicte FROMENT est consacré aux rythmes étudiants en licence.

[35Grégoire BORST, Evaluer les métacompétences, un enjeu pour la réussite des étudiants aux XXIe siècle, diffusion en direct du séminaire ‘L’évaluation de la réussite’, organisé au Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, juillet 2019, https://www.youtube.com/watch?v=yFUCdW9aYD4

[36Marie-Pia d’ORTHO, citée dans article ‘Quand le sommeil se détraque pendant les études’, Le Monde, article de Pascale Santi, publié le 18 janvier 2019

[37Francis LESOURD parle des personnes « temporellement exilées » ; Pratiques de formation / Analyses n° 51-52 (2006) : « Les temporalités éducatives – Approches plurielles », numéro coordonné par Francis Lesourd.

[38Christophe BOUJON, cité dans Profession Education, n°242, décembre 2015-janvier 2016

[39Aniko HUSTI : « la conviction générale que l’heure de cours est le temps limite de la fatigue de l’élève reflète la conception traditionnelle que c’est la longueur d’une durée, les aiguilles de l’horloge qui mesurent mécaniquement la durée de l’intérêt. », in Les Cahiers Pédagogiques, n°284-285, 1990

[40Gaston BACHELARD, Le rationalisme appliqué, Paris, P.U.F., 1949 : « L’être qui veut apprendre « repasse » la composition du savoir. »

[41Gaston BACHELARD, L’Intuition de l’instant, éd. Stock, Paris, 1932. G.Bachelard nous invite à penser le temps non plus de manière horizontale, comme durée, mais de manière verticale à partir d’instants successifs.

[42Michel VERRET, Le temps des études, Thèse d’état, Université de Lille, 1975

[43Philippe PERRENOUD, Dix principes pour rendre le système éducatif plus efficace, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation, Université de Genève, 2002

[44Sophie MORLAIX, Bruno SUCHAUT, Analyse de la réussite en première année universitaire : effets des facteurs sociaux, scolaires et cognitifs. 12015. Documents de travail de l’IREDU, n2012-2.2012, <halshs-00671336> et Amélie DUGUET, Sophie MORLAIX, Les pratiques pédagogiques des enseignants universitaires, quelle variété pour quelle efficacité ? Questions Vives,Vol.6 n°18 | 2012, http://journals.openedition.org/questionsvives/1178

[45Robert BURNS, How time is used in elementary schools : the activity structure of classrooms, in L.Wanderson (Ed.) Time and school learning. Theory, research and practice. London et Canberra, 1984

[46Marie-Pierre CHOPIN, Le temps de l’enseignement. Coll. Paideia, PUR Rennes, 2011

[47Marie-Pierre CHOPIN, Les usages du « temps » dans les recherches sur l’enseignement, Revue française de pédagogie, 170, janvier-mars 2010

[48Bruno SUCHAUT, L’organisation et l’utilisation du temps à l’école primaire : Enjeux et effets sur les élèves. In Conférence à l’initiative de la ville de Cran-Gevrier (Haute-Savoie), 12 mai 2009.

[49À travers le concept de « temps mobile », Aniko Husti propose ’un enseignement qui vise à une participation active de l’élève en lui donnant du temps pour réfléchir, pour communiquer, pour travailler collectivement’. Cela ’nécessite des durées et des rythmes diversifiés et un emploi du temps variable pour les adapter au contexte global d’un apprentissage et au rythme de l’élève’. Aniko HUSTI, Garder/perdre du temps dans l’enseignement, INRP, 1994https://www.youtube.com/watch?v=prAmmukNUig

[50André de PERETTI, Pertinences en éducation, Tome 1, Collection Pratiques enjeux pédagogiques, ESF Éditeur, 2001

[51André de PERETTI, Pour une école plurielle, Recherche et Formation, 1987

[52Paul FRAISSE, Psychologie du temps, Paris, Publications universitaires de France, 1967

[53Claire LECONTE, Des rythmes de vie aux rythmes scolaires, Presses universitaires du Septentrion, 2014

[54Mathias MILLET, Les étudiants et le travail universitaire, Lyon P.U.L., 2003

[55Alain FERNEX, Laurent LIMA, Temps de travail des étudiants (Chapitre 5), in Les vies étudiantes, La documentation française, 2016. « Une partie non négligeable de la variation dans l’allocation des différents temps provient de la discipline choisie et étudiée. »

[56Guy VERMEIL, La fatigue à l’école, Les éditions ESF, Collection Sciences de l’Education, 1976

[57Joan DOMENECH FRANCESCH, un des pionniers et principaux auteurs de cette pédagogie a défini 15 principes de la slow education, Revue Silence, N° 382, septembre 2010

[58Christine MUSSELIN, Les universitaires, La Découverte, coll. « Repères Sociologie », 2008

[59Marie-Françoise FAVE-BONNET, Les universitaires : une identité professionnelle incertaine, dans Hermès, La Revue 2003/1 (n° 35)

[60Jean-Philippe MELCHIOR, Accélération des réformes et nouvelles contraintes temporelles dans l’enseignement supérieur et la recherche, Revue Temporalités, N°17, 2013

[61Satisfaction au travail, équilibre vie professionnelle et vie privée, reconnaissance des missions... EducPros a interrogé 1.540 professionnels de l’enseignement supérieur et de la recherche.

[62personnels ingénieurs, administratifs, techniques, sociaux et de santé et des bibliothèques

[63Aniko HUSTI : « L’école donne l’éducation d’un temps statique et répétitif, l’habitude d’un temps surchargé et impersonnel, plus encore, la matrice du temps subi (…) les jeunes apprennent à l’école le temps subi et l’intériorisent profondément. » in Les Cahiers Pédagogiques, n°284-285, 1990

[64Henri LEFEBVRE, Éléments de rythmanalyse : Introduction à la connaissance des rythmes, Paris, Syllepses, 1992. « La rythmanalyse, science nouvelle en voie de constitution, étudie ces processus hautement complexes. (...) Elle se situe à la charnière du physique, du physiologique, du social, au cœur du quotidien ». Cette rythmanalyse (terme emprunté à Gaston Bachelard) apparaît aussi dans sa ‘théorie des moments’. G.Bachelard a emprunté le terme de rythmanalyse à Lucio Alberto Pinheiro dos Santos (1889-1950), dont il dit avoir reçu confidence de l’ouvrage aujourd’hui introuvable La rythmanalyse publié par la « Société de Psychologie et de Philosophie » à Rio de Janeiro en 1931.

[65Philippe ASKENAZY, Les désordres du travail, Enquête sur le nouveau productivisme, Éditions du Seuil et La République des Idées, 2004

[66Cité dans Prendre une pause pour mieux mémoriser, Réseau d’information pour la réussite éducative, publié le 5 février 2010 par Véronique d’Amours.

[67Francis LESOURD, L’homme en transition, Éducation et tournants de vie, Paris, Economica- Anthropos,2009. Cette enveloppe assurerait la cohérence temporelle d’un individu, incluant ses temporalités et son rythme propre. Elle renvoie à une capacité psychique d’organisation des temps.

[68William GROSSIN, Pour une science des temps : introduction à l’écologie temporelle, Toulouse : Octarès Editions, 1996. Six composantes constituent l’équation temporelle personnelle : la perception de son existence ‘polychronique’, l’orientation temporelle, l’horizon temporel déterminé par le passé et le futur, une disponibilité temporelle vers les autres, la gestion temporelle et la possibilité de s’ouvrir vers de nouvelles temporalités.

[69Gaston PINEAU, Temporalités en formation. Vers de nouveaux synchroniseurs, Paris, Anthropos, 2000. Gaston Pineau parle de « coupures temporelles », de « schizo-chronie » : coupure des « macro-temps physiques et métaphysiques », des « micro-temps biologiques », et des « méso-temps personnels ». La chrono-formation consiste à apprendre une pluralité de rythmes sociaux, cosmiques, biologiques, « mais implique aussi d’articuler pour soi ces rythmes, de les synchroniser personnellement […] Formation permanente, équilibre métastable, toujours compromis et le plus souvent rétabli. [...] Il faut donner sa mesure ; rythmer les rythmes ».

[70James MASY, La temporalité, une disposition sociale et culturelle de construction de l’avenir, SociologieS, 2013. URL : http://journals.openedition.org/sociologies/4287

[71François RABELAIS, Gargantua, 1534

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